Intelligence émotionnelle : seules les femmes en sont-elles dotées ?

L'intelligence émotionnelle c'est la capacité à reconnaitre, comprendre et maîtriser ses propres émotions et à composer avec les émotions des autres. Cette forme d'intelligence se définit dans la capacité à se réguler soi-même autant que dans l'interaction avec les autres.

Certain.e.s d'entre-nous sont-ils plus "naturellement" capables de faire preuve d'intelligence émotionnelle ?

Vaste sujet. Une vision assez commune que je souhaite combattre est que les femmes seraient naturellement plus enclines à comprendre et à s'adapter aux émotions de l'autre, au titre qu'elles bénéficient d'un sens plus aigu de l'empathie et du Care (la faculté à prendre soin des autres).

Lectrice (désolée cher lecteur, mais là je m'adresse à toutes celles à qui l'on a déjà formulé ce genre de propos, et si tu es un homme il est fort peu probable qu'on t'ai un jour balancé en pleine figure l'argument de ta féminité pour justifier une attente formulée envers toi), si tu ne te reconnais pas dans cette description il n'y a rien d'anormal chez toi. Mais si tu te reconnais, tu en as le droit aussi. La différence est que dans le second cas il te faudra enquêter un peu plus sur ton éducation pour comprendre si ce penchant pour le soin des autres fait véritablement appel à ton caractère et ta vocation profonde ou bien s'il est accentué par une assimilation de ce que la société attends de toi.

Je m'explique : les femmes ne sont pas "naturellement" emphatiques et dotée d'intelligence émotionnelle. Elles font simplement plus d'efforts que la plupart des hommes pour en faire preuve. Pourquoi font-elles ces efforts ? Car la société attend de la femme qu'elle soit douce, attentive, et prenne à coeur de satisfaire les besoins des membres de son foyer (conjoint, enfants, parents...). Vous êtes éduquées et socialement poussées à faire preuve d'intelligence émotionnelle !

L'intelligence émotionnelle, si elle peut-être plus ou moins développée selon les personnes, peut aussi être apprise. Bonne nouvelle, tout le monde peut s'entrainer pour développer cette forme d'intelligence.

De plus en plus, l'intelligence émotionnelle est reconnue comme une compétence, en particulier pour celles et ceux qui exercent des fonctions managériales dans leur profession. Enfin le monde professionnel commence à tenir compte du fait que nous ne pouvons pas travailler comme des machines (postulat que posait l'organisation tayloriste du travail, axée sur une logique de rendement) mais que nos émotions ont toute leur place dans les relations y compris au travail.

Trop longtemps, et encore en grande partie de nos jours, c'est l'intelligence "logique" (qui fait appel à la rationalité issue de l'abstraction et du raisonnement) qui prévaut aux yeux de la société. Rien d'étonnant, puisque cette forme d'intelligence est davantage considérée comme plutôt masculine, alors que les femmes sont facilement qualifiées d'irrationnelles, il suffit de voir combien de paires de chaussures qu'elles possèdent (joke).

Mais cette identification à la logique et au mental est dangereuse, car elle ne représente pas l'entièreté de ce que nous sommes et la manière dont nous fonctionnons. Elle ne représente que la tête, mais pas le coeur et le corps.

Je crois très fort en cette image : nous sommes entiers, rien n'est de trop : nous sommes à la fois cerveau - le royaume de la pensée, coeur - le royaume des émotions, et corps - le royaume des ressentis. Pourquoi l'une de ces trois dimensions serait-elle inférieure aux autres ?

Dans Woman and Nature, Susan Griffin partage ce point de vue et précise qu'elle entend le mot "réflexion" tel qu'il est construit dans la calligraphie chinoise : cerveau et coeur réunis.

Avez-vous déjà vu un homme physiquement dépourvu de coeur ? Une femme sans cerveau (au sens littéral) ?

Non.

Aucun genre n'est dépourvu de la faculté de développer son intelligence émotionnelle.

Il s'agit d'avoir les mêmes attentes envers tous, femme ou homme.